lundi 30 mars 2009

Retard sur Livraison

Lundi trente mars deux mille neuf. Onze heures trente-et-une du matin. Une heure de décalage horaire dans les gencives; je me rapproche d'autant de l'heure chinoise. Le temps m'a manqué récemment pour mettre à jour le fil des miens (et une connexion à domicile). Ma quatrième semaine lyonnaise s'achèvera dans deux ou trois jours. J'écris ces lignes du boulot, où je profite d'une panne d'oreiller fraternelle pour glisser ce billet dans les interstices consensuels.

Je me fais plutôt bien au changement de cadre. Je ne puis voir tous les jours mes amis parisiens, mais je compte remonter sur Paris une fois toutes les six semaines environ, donc je les verrai certainement plus souvent que durant mon exil chinois. Je ne suis qu'à deux heures de train. Il y a deux semaines, j'y suis d'ailleurs passé, manquant de peu un concert des pigeons en colère. Le trottoir était constellé de fientes.

Je m'aperçois, non dans le miroir, mais bel et bien que j'ai peu ou prou omis de mentionner ici mes lectures des deux derniers mois, et elles sont nombreuses (c'est sans doute une des raisons pour lesquelles je n'ai justement pas pris le temps d'en faire part, il y a tellement de titres que je ne les ai pas tous retenus, mais j'ai une liste quelque part que je me ferai une joie de reproduire à la prochaine occasion).

Travailler dans une librairie me procure un plaisir certain. Je me sens davantage taillé pour ça que pour l'enseignement. Je me rends compte d'à quel point je suis loin de pouvoir, actuellement, tout gérer (notamment du fait qu'outre l'aspect librairie, la boutique se veut aussi, et surtout, un point de vente spécialisé dans tout un tas de jeux, de cartes à collectionner, figurines, jeux de rôles et de plateau, domaines dans lesquels je suis loin d'avoir la science infuse). Ca tombe bien, puisque c'est encore mon frère qui fournit l'essentiel du boulot.

Je travaille beaucoup, en tout cas je suis souvent présent à la boutique, je dirais que ma semaine de travail dure soixante à soixante-dix heures, mais que les jours où je suis le plus actif, je ne vois pas le temps passer. Samedi, généralement le jour le plus dense de la semaine, j'étais tout seul (en fait, non, mais aux commandes du vaisseau, assisté par un associé plus expérimenté que moi dans la gestion du bidule) à tenir le magasin, et j'y suis resté plus de quatorze heures consécutives. J'en tire un plaisir certain.

Peu de temps, donc, pour ma vie personnelle. Ca tombe plutôt bien, je n'en ai pas vraiment. Mon studio est désormais entièrement meublé de ce que j'ai pu emporter avec moi lors de l'emménagement (trois ou quatre bibliothèques qui croulent à présent sous la moitié de mes livres que j'ai eu la place de prendre, une table qui accueille mes repas tout en soutenant ma chaîne hi-fi, une fausse armoire en bois fragile et tissu, deux ou trois chaises, et un matelas que je dresse à la verticale contre le mur, au matin, quand ma nuit a pris fin).

J'habite à quatre kilomètres de mon lieu de travail, ce qui me donne l'occasion de marcher quarante minutes le matin (en lisant), et de faire quinze minutes de vélo le soir, quand je quitte le boulot. Je me nourris le matin de céréales, le midi de sandwiches, le soir de boîtes de conserve que je ne prends pas la peine de réchauffer. Je ne mange pas assez de fruits, mais j'achète régulièrement des yaourts et des pains au chocolat. Mon alimentation n'est pas équilibrée, plutôt onéreuse et similaire à ce que je consommais il y a un an et demi, durant mon séjour orléanais.

Programme de la journée: tenir seul le fort, en attendant que le capitaine daigne descendre sur le pont. Depuis quarante-cinq minutes que j'ai ouvert la boutique, aucun client n'en a poussé la porte (en un sens, ça m'arrange, puisque j'ai pu m'épancher un peu ici). La faim commence à se faire ressentir, mais je tiendrai bon, ou tromperai la bête en engloutissant une barre chocolatée opportunément localisée à portée de mes doigts avides. La suite au prochain épisode, donc.

samedi 14 mars 2009

Voyage au Cœur de l'Atome

Samedi quatorze mars deux mille neuf. Onze heures trente-sept du matin. Sans connexion depuis mon déménagement sur Lyon, je serai bref. Tout s'est bien passé, malgré un début de tendinite aux deux jambes (trop d'étages montés en soulevant de lourds cartons). Mon nouvel emploi correspond à mes attentes. Je suis encore en formation, mais j'ai le sentiment de m'imprégner peu à peu de l'esprit familier du lieu.

Travailler dans une librairie présente un risque certain: en une semaine de boulot, j'ai déjà acheté cinq ou six bouquins. Je m'efforce de les lire avant d'en acheter d'autres, mais ça n'est pas évident. Mon nouveau logement est plus grand que l'ancien et devrait, à terme, me permettre de stocker davantage de livres. Mon ballon d'eau chaude fonctionne mal. Ma belle-sœur m'a offert une théière.

J'ai récemment lu Les yeux jaunes des crocodiles de Katherine Pancol. L'histoire de deux femmes, deux sœurs, qui évoluent, chacune dans des directions opposées, l'une plutôt vers le bas, l'autre plutôt vers le haut, tant socialement qu'en termes de développement personnel. Une bonne surprise, je m'attendais à un truc un peu nunuche, en définitive ça se laisse lire, et n'étaient mes cartons à déballer, je lui aurai fait un sort plus vite.

Actuellement en chantier, Seigneurs de l'Olympe, de l'Espagnol Javier Negrete. Péripéties à la cour des dieux grecs. Pas mal pour le moment. Egalement entamé, mais oublié à Lyon hier avant de prendre mon train pour Paris, où je passe le week-end, Hallali, de Jim Thompson, l'auteur de Population: 1280 (revisité par Jean-Bernard Pouy) et The Grifters (il y a un film avec John Cusack). Je m'aperçois que j'ai oublié de parler de mes lectures de février. Je ferai ça le mois prochain.

Programme de la journée, et de la suivante: voir un maximum de monde en un minimum de temps. Trier les affaires laissées chez mes parents. Jouer au boggle, lire des livres et voir des amis. Me promener dans les rues de Paris, me poser des questions sans y apporter de réponse concluante. Boire plus que de raison. Accroître mon déficit de sommeil. Dans quarante-huit heures, j'aurai repris le boulot. Dans l'intervalle, profiter du week-end.

lundi 2 mars 2009

La Créature du Lagon Bleu

Lundi deux mars deux mille neuf. Dix heures vingt-huit du matin. Depuis deux ou trois jours, je suis dans les cartons. A peine rentré en France, je suis de nouveau sur le départ. Les derniers détails de mon retour de Chine seront connus plus tard, mais depuis trois semaines et quelque que j'ai regagné le plancher des vaches fromagères, l'étape suivante de mon voyage globale s'est mise en place. Je serai lyonnais.

A partir de la semaine prochaine, voire avant, je travaillerai dans la librairie de mon frère. D'ici là, je dois tout mettre en œuvre pour habiter dans les environs, y ayant au préalable transféré une partie de mes biens terrestres. Le problème actuel qui me taraude est de laisser derrière moi l'essentiel de mes livres. A vue de nez, je dois en avoir entre quatre et cinq mille dans ma chambre, et la vingtaine de cartons déjà bouclés ne m'a pas tout à fait permis de vider la première bibliothèque.

Je ne prends, pour le moment, que les livres que je n'ai pas lus, mais j'aimerais bien, à terme, habiter avec tous mes bouquins. Le studio où j'emménage fait dans les trente mètres carrés, soit deux fois plus que l'espace que j'occupe actuellement. Il devrait donc, en théorie, y avoir assez de place pour tout transbahuter. Hélas, le fiasco de mon déménagement d'Orléans, l'an passé, a conduit mon père, qui pilotera le véhicule de déménagement (je n'ai pas mon permis), à décider de ne louer qu'un utilitaire de volume insuffisant. Je m'arrangerai comme je pourrai, au fil des mois à venir, pour téléporter le reste de la cargaison.

Irruption de la vie réelle, présente, dans le fil des réminiscences. J'ai encore un pied mental en Chine, que déjà je quitte l'Ile-de-France natale pour une petite ville de province, certes plus grande qu'Orléans, mais tout de même moins étendue que Paris (elle-même toute petite, qu'on la compare à Londres, Shenzhen ou Pékin pour se faire une idée de l'échelle des choses, je ne fais pas dans le parisianisme, bien au contraire, j'aime bien les petites villes qui ont tout d'une grande, et c'est pour ça qu'aller vivre à Lyon me titille agréablement l'occiput, mais j'anticipe).

Retour aux cartons. Je déménage dans deux jours. Il me reste à remplir une petite dizaine de boîtes, après quoi je devrai m'atteler à descendre des bibliothèques sur deux ou trois étages d'escaliers en colimaçon. J'avais, il y a dix jours, une entorse du pied, qui semble guérie, mais sait-on jamais... Déplacer quelques dizaines de tonnes de livres et de meubles pourrait avoir des conséquences fâcheuses sur la suite de mon entraînement pour le marathon de Lyon.